J'ai aussi assisté à la mutation graphique du hip-hop sur mon petit écran - des courageux B-boys canalisant l'agression masculine dans des exorcismes habiles de danse divine, à la poursuite sans énergie de femmes de harem et de bijoux de pacotille par des gangsters peu élégants.
Les clips vidéo m'ont appris comment jouer de mes hanches vierges comme une vieille mégère. Lors de mon bal de fin d'études, le DJ a passé des chansons pour nous transporter avec une misogynie sans retenue. Une sueur coupable transperçait ma robe pastel si chère tandis que je dansais jusqu'à l'avilissement avec mon premier amour. Nous chantions des rimes explicites qui essayaient de simplifier, d'hyper-sexualiser et de mépriser les femmes de couleur. Nos poings battaient l'air sur des rythmes aussi contagieux que l'apathie. Le courant hip-hop était un amant injurieux. Les rythmes ne cessaient de me briser le cœur, mais je continuais à danser.
Comme beaucoup de mes paires, j'ai lutté pendant des années pour réconcilier mon amour pour ma mère, pour les déesses, pour la Terre et pour moi-même avec ma consommation de culture pop sexiste. De façon ironique, il a fallu que je sois confrontée à un racisme explicite pour me réveiller. Quand les garçons des "banlieues ont commencé à lâcher le mot qui commence par "n", que mon peuple a un jour essayé de récupérer, j'ai décidé de prendre position. J'ai fait appel à la Audre Lorde au fond de moi, à la June Jordan, à la Pat Parker, à la Maya Angelou, aux Salt'n'Pepa, à la MC Lyte en moi - à chaque poétesse qui était en moi - et j'ai trouvé la force d'éteindre cette chaîne de télé, MTV, qui essayait si fort de me définir.
Aujourd'hui, je crée mes propres médias. "Pied Piper" est un clip vidéo que j'ai créé, produit et enregistré moi-même. Je l'ai réalisé sans l'aide d'une société de disque, sans un million de dollars, sans designers et sans ces retouches digitales grâce auxquelles les musiciens en vogue apparaissent sans rides, sans défauts, sans dettes et jamais fatigués.
Il n'y a que moi, le soleil, ma mini caméra DV et le logiciel d'édition qui était fourni avec mon ordinateur. Cette chanson (extraite de mon premier CD Madivinez) est une lettre de rupture à la culture pop. Cette vidéo est une ode à l'auto-expression de toutes les façons. Je souhaite que quiconque ayant besoin de mon art le trouve et que mon œuvre donnera au public la force d'agir avec authenticité.
J'écris pour la responsabilisation et l'évolution spirituelle et bien que je ne croie pas complètement aux révolutions télévisées, je suis certaine que tout mouvement pour une justice sociale sera documenté et diffusé.
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